Causerie mensuelle du CIRA-Marseille.
Les médias nous abreuvent quotidiennement de sujets de polémiques écrans
(des élections à la théorie du genre…), sans doute pour nous faire
oublier les vraies questions telles que le Grand marché transatlantique
(GMT), le démantèlement des acquis du Conseil national de la résistance
(CNR), l’appauvrissement de la classe ouvrière européenne, la mise à
sac des pays du Sud, et en particulier le cas de la Grèce, laboratoire
du néolibéralisme… Dans le doute quant aux moyens de faire front face à
cette « fin de l’histoire programmée », il est bon de revenir aux
fondamentaux, de réfléchir à la clef de voûte de l’édifice, au paradigme
qui conditionne tout le reste, l’argent.
En rédigeant le texte du Porte-monnaie, j’ai voulu en premier lieu
décrire à quel point l’argent conditionnait l’ensemble de notre vie. Les
uns courent après, les autres le dédaignent, mais tout le monde en
parle, tout le monde en souffre ou en profite, se fait exploiter ou
exploite. Changer de système monétaire c’est changer de mode de vie, de
forme de société. Il suffit d’imaginer ce qui se passerait si d’un seul
coup l’outil monétaire nous faisait défaut pour s’en convaincre.
Mon propos était donc de m’adresser au plus grand nombre. J’ai donc opté
pour le roman qui permet toutes les fantaisies et facilite la lecture.
J’ai imaginé un crash boursier en 2029 (clin d’œil à celui de 1929)
entraînant une hyperinflation mondialisée. L’argent, d’un jour à
l’autre, ne remplit plus sa fonction, mais il faut bien continuer à
vivre, à manger, à se chauffer, à se déplacer… Une fois ce prétexte
posé, je pouvais à la fois décrire les méfaits de la monnaie et
démontrer que son abolition ne serait pas la fin du monde. Je pouvais
amener le lecteur à se poser la question de l’État, du travail salarié,
de la propriété privée.
Un de mes lecteurs, attentif et cultivé, a eu vite fait de repérer mes
lectures et les passages se référant à Proudhon, Bakounine, Fourier,
Reclus, Kropotkine, Malatesta et les autres… Mais beaucoup d’autres, ne
connaissant aucun de ces gens-là, n’y ont vu qu’une utopie, un autre
possible face à l’insupportable « il n’y a pas d’alternatives » que l’on
voudrait nous inculquer.
Le porte-monnaie, n’est pas exhaustif et certains sujets ont été oubliés
ou seulement survolés. Mais on ne propose pas un changement de
civilisation, une aventure de désargence, en moins de 150 pages, ce qui
était mon pari de départ afin que nul ne puisse me dire qu’il n’a pas
eu le temps de lire et d’y réfléchir !